La coopération entre acteurs dans le domaine du bâtiment et de la construction est un enjeu majeur dans les évolutions que connaît le secteur actuellement. Les travaux que nous menons dans le domaine de l’ingénierie coopérative appliquée au bâtiment se focalisent particulièrement sur l’étude des mécanismes de coordination identifiables dans ces activités afin de proposer des solutions d’assistance adaptées.
Le travail particulier décrit ici s'intéresse à la coordination des acteurs en phase de construction des bâtiments.



1. Coordination du chantier

Nous avons distingué dans des travaux antérieurs différents types de coordination qui se caractérisent par leur nature (implicite ou explicite) [Godart 2001], le mode de communication utilisé (basé sur des artefacts ou sur l'oralité) [Andersen 2000] et les tâches particulières qu’ils induisent. Ces mécanismes de coordination et leurs caractéristiques peuvent être mis en relation avec des organisations particulières d'acteurs.

Nous distinguons trois configurations d'acteurs co-existant durant l'activité de chantier : hiérarchique, transversale et adhocratique.

Figure 1 : Les organisations d'acteurs en phase chantier.

Le graphe ci-dessous présente ces relations. Nous nous basons sur trois types d'organisations (hiérarchique, adhocratique et transversale), définies par les théoriciens du XXème siècle [Toffler 1970, Mintzberg 1979, Thompson 1967] :
Figure 2 : Organisations et mécanismes de coordination.

Ces types d'organisations et les mécanismes de coordination associés permettent de caractériser les activités de coordination existant sur les chantiers de construction.



2. Outils

Des outils spécifiques permettent au coordinateur d’effectuer les tâches de coordination hiérarchique. Les autres acteurs en font usage afin de prendre connaissance de l'information relative à la coordination.
Nous noterons :
- Les outils de compte-rendu de chantier (tel le prototype Image.Chantier développé dans des travaux antérieurs) et de planning, permettant la formalisation et la diffusion de l’information.
- Les outils de synthèse ou de représentation du projet architectural permettent de recadrer l’activité en fonction des objectifs et des plans (CAO, maquettes numériques, 4D).

Dans le cas de la coordination adhocratique, mettant en œuvre des mécanismes « d’ajustement mutuel », la communication informelle (implicite, oralité) est majoritaire. Mis à part les outils de communication comme le téléphone, le fax etc. elle est peu médiatisée. Cependant les acteurs utilisent les outils précédemment cités pour prendre connaissance du contexte coopératif afin de prendre des décisions.


3. Plusieurs constats :

- Pour améliorer la coordination il est nécessaire de fournir aux acteurs la bonne information, au bon moment et de manière adaptée.
- L'acteur doit donc être au centre de la conception des outils d'assistance. Son profil personnel (rôle, métier, tâches à effectuer, matériel utilisé, environnement de travail) permettent de définir des interfaces adaptés et efficaces.
- Les outils existants et utilisés actuellement représentent une partie du contexte de projet mais ne partagent pas un contexte commun.
- Les concepts qu'ils manipulent ne sont pas identiques mais il existe cependant une certaine proximité entre ces concepts (une tâche de planning correspond à un objet du modèle 3D par exemple). Leur modèle de visualisation correspond aux concepts visualisés.



4. Proposition d'une interface

Face à ces constats, l'hypothèse que nous formulons est la suivante :

La mise en relation de l'information contenue dans les divers documents et outils de coordination peut favoriser la compréhension du contexte par les acteurs du chantier (contexte relatif aux processus en cours ou encore aux autres acteurs du groupe et à leurs états)

La mise à disposition d'une interface de visualisation multi-vues peut favoriser la compréhension de ces relations, et plus largement la compréhension du contexte de coopération.

Nous proposons donc de développer une interface multi-vues (Bat'iViews) qui aura pour vocation :
- de permettre la visualisation des différentes informations relatives à la coordination, dans des modes de visualisation existants (compte-rendu, planning) ou émergents (maquette 3D, graphe),
- de naviguer dans le contexte coopératif, par l'exploration des différentes vues et par la mise en relation des concepts liés entre les vues (interactions).

Figure 3 : Vue de l'interface Bat'iViews v0.2.



4. Références

[
Toffler 1970]
Toffler, A.: Future Shock, Ed. Random House, New York, 1970.

[Mintzberg 1979]
Mintzberg, H.: The structuring of organizations: A synthesis of the research, Ed. Englewood Cliffs, NJ, Prentice-Hall, 1979.

[Thompson 1967]
Thompson, J.: Organizations in Action: Social Science Bases of Administrative Theory Ed. McGraw-Hill, 1967.

[Godart 2001]
Godart, C., Halin, G., Bignon, J.C., Bouthier, C., Malcurat, O. & Molli, P.: Implicit or explicit coordination of virtual teams in building design. CAADRIA 2001, Ed. University of Sydney, Key Centre of Design Computing and Cognition., 2001.

[Andersen 2000]
Andersen, P. B., Cartensen, P. H & Nielsen, M.: Dimensions of coordination. 14-16 september 2000. LAP 2000. The fifth international workshop on the language-action perspective on communication modelling. Aachen, Germany, 2000.